Les organisateurs du festival parisien avaient donc décidé de vendre cette édition 2012 de Rock en Seine comme celle des 10 ans, même si techniquement les 10 ans se fêteront l'an prochain (premier Rock en Seine en 2003)... Et on était donc en droit d'attendre un programme phénoménal pour fêter dignement cette 10ième édition... Et bien c'est raté... Ou presque...
Après l'annonce de la programmation on avait déjà commencé à plisser des yeux : Placebo, Black Keys et Green Day en têtes d'affiche, on était bien loin des rumeurs incessantes qui annonçaient pour les 10 ans la venue de
The Cure,
Radiohead et même
Blur... Au final, on sera pas passé loin de la catastrophe avec un samedi plutôt mauvais, un vendredi de bonne tenue et heureusement un dimanche très bon qui sauva l'impression générale et Rock en Seine d'un naufrage annoncé après l'enchainement des déceptions de la veille...
Sigur Ros au sommet, les révélations Gesaffelstein et C2C
Une première journée plutôt plaisante qui commence mal avec les lourdingues Billy Talent qui nous servent un hard rock indigent formaté pour les FM US... On part de ce pas suivre le showcase d'Erevan Tusk dans la tente Ile De France : une pop sous influence british plus que sympathique bien qu'entendue déjà 1000 fois... Yeti Lane nous envôute une nouvelle fois après sa prestation réussie en 1ère partie des
Brian Jonestown Massacre au Trianon. Comme à son habitude, Mathias Malzieu et sa bande d'allumés de
Dionysos enflamment la grande scène avec leur rock foutraque plein de vie et d'humour. Ils possèdent leur propre univers bariolé, enfantin et cartoonesque et n'ont aucun mal à nous y faire rentrer...
A 20h, Bloc Party débarque sur la grande scène. Leur nouvel album au son rêche et crade se prête plutôt bien à une interprétation en festival. Un set carré et précis auquel il aura tout de même manqué un petit supplément d'âme... Sur la scène de la cascade, les islandais de
Sigur Ros éblouissent Rock en Seine de toute leur classe. Leur musique planante et mystique nous emporte littéralement dans un autre espace temps. Beauté, finesse et intensité... Les enchainements de moments de liturgie d'une rare zénitude avec des emportements soutenus par une batterie martiale et percutante sont un pur moment de bonheur...
La tête d'affiche
Placebo aura rempli son contrat en électrisant la grande scène à la tombée de la nuit. En grande forme, Brian Molko et ses sbires délivrent une très bonne prestation, pleine d'intensité... On regrettera un set-list faiblard qui fait la part belle aux derniers albums du combo en oubliant leur géniaux deux premiers albums (un seul titre de "
Without you I'm nothing"... quelle déception...). La révélation du jour aurait été sans aucun doute
Gesaffelstein qui dans le cadre du collectif
Bromance aura percé les nuages avec une electro assez originale qui manie à merveille percussions old school, rythmique tendue et réminiscences techno de Detroit. Les
C2C clôtureront merveilleusement la soirée avec leurs scratchs incessants et leur éclectisme musical qui les voit picorer du rap old school ou du coté des vieux disques de Ninja Tune... Avec en prime un hommage réussi aux Beastie Boys...
Le naufrage du samedi à peine atténué par Noel Gallagher et Agoria
Après une première journée réussie mais tout de même en deçà de ce que l'on pourrait attendre pour fêter dignement un 10ième anniversaire, on part plein d'espoirs pour cette seconde étape avec beaucoup de découvertes potentielles à faire à défaut d'une affiche avec de grands noms... Ca commence plutôt bien avec un set plein d'énergie des Ume. Leur rock indé d'énervé fait bonne figure... Après cela on va enchainer les perles de la déception... Palme d'or pour Granville (vraiment naze)... On ne comprend absolument pas l'engouement de quelques médias pour ce groupe de... variété style années 80, ce n'est pas du rock (certains de mes acolytes parlaient d'un copié-collé en beaucoup moins bien de Coeur de Pirate... d'où peut être la signature sur un label et le support des médias?...) et ca n'a pas grand chose à faire à Saint Cloud... On a pas du tout aimé... Pas plus que l'autre soit disant révélation electro pop française, Hyphen Hyphen que certains canards (les mêmes d'ailleurs) tentent de nous vendre... Plat et chiant à mourir... Toy a déçu également. Leur rock shoegaze surfe sur la vague
The Horrors sans leur arriver à la cheville...
Deux garçons de 15 et 18 ans vont illuminer cet après-midi morose...
The Bots, en nous servant un set avec l'énergie des White Stripes et presque la vista de leur leader, nous aura regonflé quelque peu... Avant d'être rattrapé par la patrouille de la lassitude avec un set un peu plat de
dEUS capable de bien mieux... Peut être la faute à un son un peu brouillon et imprécis qui nous aura empêché de rentrer dans le truc...
A 20h,
Noel Gallagher foule enfin le planches de la grande scène, 3 ans après claqué la porte et dissous Oasis dans les coulisses du festival juste avant le passage prévu du groupe... Une belle prestation mais trop courte... 5 titres d'Oasis (dont 3 faces B) et les excellents morceaux de son premier effort solo... Autant les récentes prestations de sieur Gallagher au
Casino de Paris et au
Grand Rex nous avaient enthousiasmé autant ce show devant une si grande assistance nous aura rappelé ô combien son frère Liam aurait été utile avec son charisme et sa morne toute rock'n'roll star... Ensuite, les Black Keys ennuient... Si leur formule est efficace dans de petites salles, sur la Grande Scène ca a du mal à nous passionner (n'est pas
Jack White qui veut...). Avec un set furieux et rentre dedans,
Agoria nous aura réveillé et permis de finir sur une bonne note cette terrible journée... La pire (et de loin) après 8 années de Rock en Seine vécus... Pour les 10 ans ca la fout mal...
Le vaisseau spatial Beach House et la renaissance
On débarque en ce dimanche avec l'horrible sensation que ce
Rock en Seine 10ième édition est en train de sombrer et de se transformer en plus mauvaise année de ce festival parisien qui nous aura habitué à grand ces derniers temps... Heureusement,
Stuck in the Sound nous réveille avec leur rock percutant... Par contre, bien que plaisante, l'electro pop de Passion Pit nous aura partiellement convaincue... Rien de neuf ici... C'est gentil et les plus jeunes apprécient...
Heureusement, les
Dandy Warhols viennent sonner la révolte... psychédélique... En faisant la part belle à leur second et troisièmes albums (les meilleurs) les
Dandy font le choix d'un set ultra psyché et cramé sous influence shoegaze ... Ce qu'il savent faire de mieux (et c'est parfait avec le soleil déclinant sur la Grand Scène)... Avec des titres comme 'I love you', 'Not if you were the last dandy on earth' le concert part fort... Une relecture downtempo de leur tube 'we used to be friends', histoire de rester dans le ton et quelques perles dont ils ont le secret et le show arrive déjà à sa fin avec les énormes 'Bohemian like you' qui électrise la foule et le superbe 'Godless'... Génial.
On part de ce pas assister à la reformation de
Grandaddy sur la scène de la cascade. Désespérées et lumineuses à la fois, les chansons de Jason Lytle résonnent avec une troublante vérité en ces temps de crise. Une roller coaster émotionnel ultra prenant et une belle exclu pour Rock en Seine... Après un petit tour scène de l'industrie pour voir la pop électro sautillante de
Little Dragon, direction la scène Pression Live pour le meilleur concert du festival...
Alex Scally et Victoria Legrand, de
Beach House, ont hypnotisé les auditeurs... Une set spatio temporel, à voir la photo titre on se serait cru dans un vaisseau spatial. Et on en était pas loin... Sur des nappes de synthé stellaires appuyées par des arpèges cristallins (du Jonnhy Marr reverberisé à l'extrême) et une batterie martiale martelant un tempo entrainant le festivalier se trouve projeté dans un univers onirique, coloré, mystérieux... Comme dans un rêve... Une ENORME claque et THE CONCERT de Rock en Seine 2012... Il aura fallu attendre le dernier jour et presque l'ultime seconde pour revivre l'un de ces grands moments dont le Parc de Saint Cloud a le secret... Ouf il était temps!
L'ultime round se jouera sur la scène de l'industrie. On aura fait l'impasse sur Green Day et on aura vraiment pas eu tort tellement la prestation de
Dope D.O.D aura été bluffante... Un rap old school sombre, percutant et efficace. Une sorte d'énergie metal au service du rap originel... Parfait pour se défouler et finir en beauté ces 3 jours...
Au final, l'ultime journée aura donc changé notre regard d'ensemble sur cette édition 2012 tellement mal embarquée après le catastrophique deuxième jour... Un grand et beau final qui nous permet de repartir heureux du Parc de Saint Cloud, comme chaque année... Mais pour 2013 on attendra une programmation plus audacieuse, plus constante et plus éclectique (l'electro et le rap ont été cantonné à la portion congrue à la différence de 2009 ou 2010)... Messieurs les organisateurs on compte sur vous pour nous surprendre pour les vrais 10 ans du festival...
A lire également Rock en Seine
2008,
2010 et
2011 et sur l'édition 2009
Them Crooked Vultures et
Oasis (quoi un article à la libé sur ce blog? ;) )