lundi 26 août 2013

Rock en Seine 2013 : Un bon crû survitaminé par Nine Inch Nails, System of a Down et Paul Kalkbrenner


Les années se suivent et ne se ressemblent pas... Fort heureusement. Si l'édition des 10 ans avait fortement déçue (voir le live report), Rock en Seine 2013 restera comme une belle année. Pas du niveau des cuvées exceptionnelles de 2005 et 2010, ni même de 2011 mais en bonne position juste derrière...

Les têtes d'affiche ont assuré et fait pulser la grande scène (Paul Kalkbrenner, Nine Inch Nails, System of a Down) tandis que de belles jeunes pousses auront illuminé les scènes annexes : Daughter, Alt-J, Jc Satan, la Femme, Parquet Courts...

Le minimalisme triomphant et rafraichissant de Daughter, Alt-J et Paul Kalkbrenner

C'est sous la chaleur torride de l'été que nous commençons notre pèlerinage annuel Porte de Saint Cloud. 31 degrés au compteur, on se fait rôtir comme des sardines devant la prestation sympathique du jeune rapper de Chicago Chance The Rapper sur la grande scène. Une pression au passage et on part voir Savages sur la scène de la cascade. Les 4 filles se démenèrent pour faire vivre leur cold wave en plein cagnard, mais la sauce prend difficilement dans ce contexte torride et si tôt dans la journée (on aura largement préféré leur show au festival des Inrocks 2012).

Après un sympathique Belle & Sebastian sur la grande scène (leur pop typiquement british made in 90's rappelle de bons souvenirs à certains...) on se rend en direction de la scène Pression Live pour la première baffe de ce Rock en Seine 2013 : Daughter. On s'était déjà enthousiasmé pour leur concert au Café de la Danse en avril et on à pas été déçu par leur seconde venue parisienne. On se demandait comment leur indie pop si intimiste allait passer dans le cadre d'un festival de plein air? Et bien après un début timide, les 4 Daughter (3+1 sur scène) auront retrouvé cette équilibre si parfait qui leur permet de transmettre tant d'émotions avec peu de moyens. La voix d'Elena Tonra nous donne encore des frissons... Un futur grand Groupe...

On zappera la coqueluche des médias, Tame Impala, dont le concert à l'Olympia en juin dernier ne nous aura pas laissé un grand souvenir (on s'est rarement fait aussi chier en concert) pour aller préter une oreille attentive à l'immense Johnny Marr. Bon concert avec quelques reprises des Smiths forcément (dont notre Best Song Ever 52) mais sans la voix de Morrissey...

Ca s'enchaine directement avec Alt-J sur la scène adjacente. Là encore, c'est avec peu d'effet et un minimalisme porté aux nues que le jeune quartette anglais subjugue littéralement le public. Ils seront tout de même passés en quelques mois de la Boule Noire à la scène de la Cascade de Rock en Seine... Sur la grande scène Franz Ferdinand assure le spectacle. C'est calé, précis et la plupart du temps efficace, mais ce sont, de loin, les morceaux du premier album qui passent le mieux... On sent les écossais en perpétuelle quête de cette alchimie improbable des débuts... Une quête certainement vaine...

Petit amusement sympathique avec Kendrick Lamar avant le clou du spectacle de cette première journée : Paul Kalkbrenner sur la grande scène. En 2011, le producteur allemand avait enflammé la scène de la cascade avant de prendre d'assaut le Zénith parisien, et c'est tout naturellement que sa techno minimaliste reflétant à merveille le meilleur de la scène berlinoise des années 2000 devait triompher dans le cadre de la scène principale de Rock en Seine. Une musique électronique d'une grande classe sachant allier décontraction et punch. Parfait pour finir la soirée en beauté!

Un samedi explosif et dévastateur : Nine Incha Nails, Vitalic et la jeune garde française

On perd presque une dizaine de degrés et on se retrouve sous un ciel menaçant pour entamer ce Day 2. Et parfaite entame avec le jeune quatuor français Fi/She/S. Une pop alambiquée et rêveuse qui lance doucement mais surement la journée. Un groupe à suivre. Sur la scène Pression Live, In the Valley Below nous permet de finaliser cette douce entrée du samedi. On s'allonge dans l'herbe, on écoute leur musique planante et on part loin...

Sur la scène de l'Industrie les JC Satan nous réveillent avec leur rock énergique que l'on avait qualifié de "psyché pop métal" lors de leur passage en janvier à la Maroquinerie. Après avoir écumer les petites salles à la sortie de leur 3ieme LP à l'automne (ils ont joué au Kraspek Myzik à Lyon quelques semaines après Moslyve en novembre), les choses ont pas mal bougé pour eux en 2013 (Printemps de Bourges, Nuits Sonores et donc RES) et on en est ravi!

Autre groupe français pour qui 2013 est une année de succès : La Femme. Leur pop en français mélangeant habilement la pop synthétique années 80, le surf rock, et la coldwave, le tout sonnant indéniablement moderne aura marqué les esprits. Et leur set à Rock en Seine devant une foule aux anges confirme leur talent. De l'autre côté du parc, nos chouchous du Black Rebel Motorcycle Club entrent en jeu. Un début de concert assez poussif avant que pour une raison indéterminée leur set prenne une tout autre tournure après la ballade "Lullaby". Cet intermède interstellaire passé et on retrouve la morgue et la hargne BRMC que l'on adore. Cramé et psyché!

Petite pause (il faut bien se restaurer et se préparer pour l'enchainement de la soirée...) et l'on part sur la Grande Scène voir l'évènement Nine Inch Nails. On a beaucoup de respect en ces lignes pour l'intégrité artistique de Trent Reznor et sa capacité à rester authentique après plus de 25 ans de carrière... Le show NIN 2013 est sans surprise : c'est d'une intensité viscérale terrifiante dès les premiers morceaux (certainement pour faire partir les touristes) avant qu'à la nuit tombée, Reznor ne nous amène vers des terrains plus éthérés mais toujours aussi forts... NIN l'archétype de ce que l'on aime dans le Rock : cette énergie vitale si précieuse... Et bien sûr, le show ne pouvait que se terminer sur notre Best Song Ever (épisode 35): Hurt.

La suite est toute aussi puissante avec Vitalic, mais beaucoup plus psyché. Une nouvelle baffe. Et on préfère terminer la soirée avec l'electro ludique et toute en rondeur de Fritz Kalkbrenner que par Phoenix. Une très belle seconde journée, épuisante mais jouissive, qui se termine avec les premières gouttes d'eau...

Un final punchy et chamanique : The Bloody Beetroots, System of a Down et Tricky

Ce dernier jour commence par un crachin continu des plus irritants qui nous aura incité à retarder notre arrivée sur le Parc de Saint Cloud. On commence donc tranquillement par The Computers sur la Grande Scène. Rock d'obédience fifties assez efficace. Le chanteur fait le show et leur reprise des Clash est sympa (Stand by Me).

Mac Miller et son rap sur des beats old school aura ravi l'assistance avant que Is Tropical nous déçoive énormément. Trop pop, pas assez électro, on ne restera pas jusqu'au bout... Direction la scène Pression Live pour un joli concert des américains de Parquet Courts. En mélangeant des influences indé 90's (Pavement, Sonic Youth) et punk, les 4 New-Yorkais d'adoption envoient du lourd et nous font passer un bon moment. Dissonant en diable, comme on aime...

Sur la Grande Scène, l'electro-rock varié et malin des Bloody Beetroots aura triomphé. Sur leur tube, la foule se déchaine et c'est tout le Parc de Saint-Cloud qui saute en cadence. Une belle baffe inattendue... Après avoir écouté une partie du set de Major Lazer que l'on trouvera un peu inégal (les parties plus techno nous plaisent beaucoup quand d'autres passages Dancehall nous irritent...) on part à la rencontre de l'autre mastodonte du weekend après NIN : System of a Down. On ne sera resté que pour quelques titres (dont le démentiel "Prison Song") mais on en aura pris la gueule. Waouh, quelle présence de Serj Tankian, quelle énergie déployée, quel impact...

On part presque à reculons tellement c'était grand pour assister au concert de Tricky. Chamanique, c'est encore une fois le terme qui caractérisera le mieux la prestation du natif de Bristol. Agissant tel un chef d'orchestre avec ses musiciens, en leur indiquant d'un geste à quel moment accélérer, s'arrêter ou reprendre de plus belle, il mène ses chansons au fil de ses envies et de ses désirs. Même si par moment ca peut paraitre un peu longuet, c'est toujours intense et vrillé. On retiendra une étonnante reprise des Breeders, Do you love me, étirée sur près de 10 minutes. Un bel trance pour finir ce Rock en Seine 2013 qui restera un très bon crû. Et comme chaque année, on se dit la même chose : vivement l'année prochaine...

A lire également Rock en Seine, 2008, 2009, 2010, 2011 et 2012.

lundi 19 août 2013

Best Song Ever (épisode 88): Upside Down par The Jesus and Mary Chain


L'archétype de la pierre angulaire immanquable dans notre quête absolue de la Best Song Ever : le strident, dangereux et hallucinant "Upside Down" de The Jesus and Mary Chain.

Il s'agit du tout premier single du groupe, d'abord édité en 45T à 1000 unités seulement, et l'une des toutes premières références du tout nouveau label Creation Records, créé par un écossais débonnaire, Alan McGee. La K7 de démos du groupe avait été remise en main propre à McGee par l'un de ces vieux compagnons de Glasgow, Bobby Gillespie, un proche du groupe (il s'assiéra rapidement derrière les futs du groupe après ce single pour fonder ensuite Primal Scream).

Quel coup de tonnerre, quelle scie à vriller les cerveaux en deux que ce titre totalement déroutant. Rendu quasi inaudible, la mélodie est toalement vampirisée par un larsens de guitare strident omniprésent de la 1ère à la dernière seconde. C'est totalement fou et tellement radical que l'on ne peut qu'applaudir des deux mains sur un blog nommé Mind Riot Music (aussi un label on le rappelle... ;)

29 ans plus tard c'est toujours une tuerie (le 45T est sorti en novembre 1984). La légende veut que non content du mix réalisé par le producteur, c'est Alan McGee lui même qui finalisa le tout et qui poussa le potard jusqu'à 9 pour que le larcens puisse prendre toute son ampleur, sous le regard ahuri du groupe qui se demanda qui était ce savant fou qui leur demandait de leur faire confiance...

Quel suicide commercial auraient pensé la quasi totalité des professionnels. Pas McGee. Et l'histoire lui renda grâce : Plusieurs ré-éditions, 35000 copies vendues et le son du futur et mythique premier album de The Jesus and Mary Chain tout trouvé (Psychocandy reprendra largement la trouvaille du producteur pour donner au monde l'album ultime de Noisy pop).

Plus que cela encore, ce premier succès pour le petit label indé Creation Records, assura une rentrée d'argent non négligeable qui donna les moyens à McGee de lancer pleinement l'aventure (il céda d'ailleurs The Jesus and Mary Chain à WEA au passage). Sans ce pari, ce risque fou, peut etre n'aurions nous jamais entendu les nombreux groupes mythiques qui firent les belles heures de Creation Records quelques années plus tard : Ride, My Bloody Valentine, Primal Scream, Oasis, Slowdive.

Un monument, vraiment.

jeudi 15 août 2013

Angil (sans les Hiddentracks) et Dotsy Dot à la Fabrique Balades Sonores (14/8/13)

Il y a de ces soirées quelques peu inattendues qui ont le charme de l'évidence et de la simplicité. Le showcase de Angil, accompagné puis accompagnant Dotsy Dot, à la Fabrique Balades Sonores aura été de ces instants de grâce qui laissent un souvenir ému.

Pour être honnête, on a découvert tardivement cet activiste de la scène indé et sa venue dans le contexte ultra intimiste d'un Showcase à la Fabrique Balades Sonores (autres activistes frénétiques de la sphère underground) était la parfaite occasion pour s'inviter dans l'univers du Monsieur. Et que ce monde ainsi découvert nous a plu. Ses références au meilleur du rock indé laidback (Pavement), dissonant (Sonic Youth) et inventif (Sebadoh) nous parle forcément en ces pages. Petit côté sentimental supplémentaire puisqu'Angil nous confiera qu'il fait ce soir son dernier concert avec son inséparable guitare Danelectro qui le suit depuis 20 ans et qui va changer de propriétaire au détour du Fort de Saint Malo lors de la route du rock... 

Dans la première partie de son set, Angil aura joué une bonne partie des titres issus de son tout récent EP en date, sorti sur We are Unique Records et financé en partie via Microcultures. 250 exemplaires vinyles 25 cm dont 190 pré-commandés par les internautes. Angil a clairement sa troupe de fans inconditionnels savamment gagnée à la sueur de 10 années d'une carrière indé (on osera le terme underground dans le plus noble sens du terme) remarquable. Un très beau set qui se termine, forcément, par une reprise bien sentie de Pavement (we dance).

La gentillesse et la sympathie distillée par le chanteur et sa facilité à instaurer un lien intimiste et sincère avec son public nous auront ravis. Une superbe soirée. Et que dire de la suite avec le showcase de Dotsy Dot, aidée par Angil à la guitare et aux backing vocals. La surprise fut totale. D'apparence timide et fragile, Dotsy Dot se transforme littéralement dès les première notes. L'intensité mise par la jeune femme sur les deux premiers morceaux d'obédience bluegrass nous mettent une petite claque. On pense à PJ Harvey première époque pour cette force dégagée. Une reprise bluffante de Sonic Youth finit de nous achever (Little Trouble Girl). Même si son set aura paru inégal, les moments où Dotsy Dot lâche prise nous donnent vraiment l'impression qu'un très gros potentiel est là et ne demande qu'à éclore...

Et pour continuer dans le même univers, à lire également quelques posts sur Pavement, Sonic Youth, Troy Von Balthazar ou encore via la scène underground française Arch Woodmann ou Alexandre Varlet...

vendredi 9 août 2013

Best Song Ever (épisode 87) : Souvlaki Space Station par Slowdive


Groupe totalement oublié du mouvement shoegaze, Slowdive avait pourtant pondu en 1993 un fabuleux album rêveur, lancinant et spatial... Hébergé sur Creation Records (quel nez ce McGee...) comme la plupart des groupes importants de ce début de décennie (Ride, Primal Scream, My Bloody Valentine... puis Oasis), Slowdive aura eu le malheur d'arriver à maturité au mauvais moment...

Au moment de la sortie de leur second LP, Souvlaki, en mai 93, le mouvement shoegaze est passé de mode, la faute à la déferlante de Seattle qui aura tout submergé sur son passage. Nirvana s'apprête à sortir "In Utero", Pearl Jam a explosé avec "Ten", Soundgarden avec "Badmotorfinger" tandis que les porte drapeaux britons s'enlisent : Ride perd de sa créativité, les Stone Roses périclitent, My Bloody Valentine se perd déjà dans la réalisation du successeur au mythe "Loveless" (qui ne sortira que 20 ans plus tard, un soir de février 2013...).

Un timing totalement à coté de la plaque, des critiques bercées par la rage et le mal être du grunge qui ne comprend rien à la beauté évanescente de Souvlaki. Et pourtant, durant la totalité du disque, on se sent transporté, quelque part au loin, dans un bel endroit onirique et rempli de songes charmeurs. La voix envoutante et sensuelle de Rachel Goswell n'y est pas pour rien. Les compositions du maitre Neil Halstead sont sublimes. Le son est un délice, et on a même droit à la participation du grand Brian Eno sur deux morceaux...

Le coeur de ce disque est à chercher au détour de la Face B du 33 Tours avec le superbe titre "Souvlaki Space Station". Des mélanges de guitares noisy, réverbérées et pleines d'échos créent une strate sonore lumineuse que la basse vient carresser dans le sens du vent. Rachel apporte la touche aérienne qui vient faire définitivement décoller ce morceau divin...

Le webzine Soundsbetterwithreverb a même récemment classé Souvlaki en seconde position de son TOP 100 shoegaze albums, entre My Bloody Valentine et Ride tout de même... C'est amplement mérité...

A lire également dans le mood Shoegaze : Best Song Ever Ride ou My Bloody Valentine...