lundi 23 novembre 2009

Les années 2000: une décennie musicale décevante? Episode 2: Le Retour du Rock


Une décennie s'achêve et c'est déjà le temps des bilans. En sept épisodes, on va essayer de se repasser le film de ces années musicales, histoire de reprendre le train en marche, de tenter les premières analyses avant de s'engouffrer le coeur léger vers les années dix, forcément passionnantes...

Après la mise en perspective, on rentre dans le vif du sujet avec ce deuxième épisode et le Retour du Rock...

Les Années 2000: une décennie musicale décevante? Episode 2...



Le Retour du Rock

Le rock a été le principal perdant de la fin de la décennie précédente avec l’avènement de la musique électronique en général (techno, house, lounge etc…) qui mit à mal la suprématie du vieux mouvement quarantenaire. A chaque fois que l’on a cru le rock mort et enterré, il ressurgit et renait de ses cendres, tel un phénix légendaire. Cette nouvelle vie prit forme à la veille du 11 Septembre avec la sortie fin aout 2001 du premier album d’un jeune groupe de New Yorkais issus de la classe plutôt aisée : The Strokes. Avec ‘Is this it’ ils signent un brillant album de rock qui marie de manière subtile et intelligente pop et rock indé US à la sauce punk. Aidés en cela par une production sublime au son vintage, les Strokes remettent au goût du jour un songwriting rock exigeant et un retour à l’énergie salvatrice du rock. Ils ramènent sur le devant de la scène cette urgence, cette incandescence propre à la musique rock qui retrouvera un écho sans pareil dans ce monde post 11 septembre rempli de paranoïa, de malaise, de peur et de désarroi. En ces temps troublés, un retour à l’énergie basique, contestataire et instinctive du rock semble devenir un réconfort indispensable, une bouée de sauvetage éternelle. C’est ainsi que des milliers d’ados laisseront de côté l’hédonisme festif de la house et de la techno qui avait bercé la seconde partie euphorique de la décennie précédente, pour revenir à une simplicité tribale et émotionnelle provoquée par la musique rock.

En ce sens, l’émergence des White Stripes à la fin de 2001 avec leur troisième album ‘White Blood Cells’ parait inévitable. Le retour à l’essence même du blues et du rock, le dévouement à la pureté de l’émotion viscérale provoquée de par leur parti pris de jouer en duo guitare / batterie en remisant de coté l’apport d’une basse, fait mouche. Ils exploseront définitivement au niveau mondial en 2003 à la sortie de leur quatrième album, le bien nommé ‘Elephant’. Le leader du groupe, Jack White, restera comme l’un des musiciens indispensables de la décennie, que ce soit avec les White Stripes ou ses Side Projects, les Raconteurs avec Brendan Benson (ils forment un duo de songwriters assez incomparable qui pourrait devenir l’égal des plus grands) ou encore The Dead Weather avec Alison Mosshart des Kills où Jack se retrouve derrière les fûts pour déverser un blues rock épais, crasseux et viscéral, l’essence même du rock… En Europe, la réponse aux américains, se prépare, une nouvelle fois en Angleterre, avec l’émergence des Libertines de Pete Doherty et Carl Barat. Signé sur l’historique label indé Rough Trade, la production du premier album de ce groupe prometteur est confiée à l’ancien Clash Mick Jones (Up the Bracket sorti en 2002). Il saura trouver le son parfait pour rendre le meilleur des compositions pop/punk du nouveau duo de songwriters rois. Les Libertines apportent une énergie nouvelle et rafraichissante à la scène londonienne.

Les Strokes et les Libertines ont redonné un second souffle au rock en suscitant un intérêt nouveau et surtout bon nombre de vocations auprès des ados musiciens en herbe. Nombre de groupes se sont formés dans la foulée, alimentant le retour annoncé d’une attitude, d’un mouvement qui une fois de plus reprenait le devant de la scène à coup de riffs incendiaires et de cris furieux toujours au service d’une mélodie efficace et instantanée. Les White Stripes auront engendré l’arrivée des duos abrasifs Kills (les concerts de The Kills restent les shows les plus sexy et émotionnellement intenses de la décennie) ou Black Keys. Les Libertines entraineront derrière eux une nouvelle scène britannique (Franz Ferdinand, Futurehead, Hard-Fi, Bloc Party, Servants, The Coral, Razorlight…) et la même chose se produira Outre-Atlantique avec les Strokes (Killers, Ryan Adams) et aura même des échos jusqu’en Australie (The Vines, Jet).

Le retour du rock dans un contexte noir et de dépression ouvrira la porte au comeback d’une musique sombre, largement influencée par la new wave et cold wave des années 80. Dans un environnement médiatique propice à la propagande régressive vers la mode eighties, des groupes brillants comme Interpol vont continuer les explorations de leurs ainés et proposer une relecture personnelle d’une grande intensité d’un héritage noir de guitares saturées à l’extrême dans un flot de réverbération abyssal, le tout enrobé par une batterie martiale et une voix grave apocalyptique. Le premier album d’Interpol, ‘Turn on the Bright Lights’ en est le fer de lance. Malheureusement, le groupe semblera avoir du mal à digérer leur succès et leur musique claustrophobique aura du mal à s’adapter à l’espace des grandes salles.

Nombre de groupes s’engouffreront dans cette brèche, avec beaucoup de malice et d’inspiration souvent, parfois sauvés par une vraie authenticité, une urgence, un dont de soi (voir en ce sens le premier album des Editors ‘The Back Room’, la suite sera beaucoup moins convaincante, également à écouter le premier album The Rakes : Capture / Release) mais de trop de fois noyés dans un son à la mode et des chansons pas vraiment à la hauteur (Death Cab for Cutie, Killers, Superbus… etc). A cet égard, l’évolution d’un groupe comme Coldplay est assez symptomatique. Après un sympathique premier album en 2000 (Parachutes) ils enchainent avec un second album en 2003 souvent brillant (A Rush of Blood to the Head) qui les fait exploser mondialement avant qu’ils ne sortent en 2005 un troisième album insipide totalement dévoué au son années 80 version Grands Stades. Une grande déception pour un album inaudible et qui sent la guimauve. Il faudra bien le recours au génial Brian Eno pour leur rendre un peu de crédibilité en 2008.

A suivre l'épisode 3 : Le Rock et ses chapelles abrasives, parfois déviantes...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bel article bien écrit et documenté qui ne prend pas parti pour l'un ou l'autre des groupes comme c'est souvent le cas. Good job, quoi !